Asgabat - Turkmenistan

S’il est un homme courtise dans cette republique du desert, c’est surement celui qui se fait appeler Turkmenbasi (le Pere des Turkmens, en toute humilite). La lubie de ce sympathique despote est l' architecture, enfin, une certaine forme d'architecture. Un style que le quidam pourrait qualifier de kitsch post stalinien. Dans le combat pour les appels d'offres, Bouygues est lice contre les entreprises turques, qui ont pour elles la proximite de la langue. En ce sens, j ai donc a mes cotes une authentique traitresse ; nee à Ankara, elle s'apprète a bosser pour le magnat francais. Une dizaine de cadres revenant de perms l’accompagnent. Entendre brailler le francais au dessus de la Caspienne a de quoi décourager le type qui se vantait de courrir apres le depaysement. Passons. Pour tout champion du BTP qu'il est le president Niazov a du oublier dans ses plans la retape de son parc hotelier. Celui ou le taxi me jette a le charme discret d'un orphelinat bielorusse, la serrure en moins... Je suis depuis quelques minutes a la recherche d’un bureau de change clandestin (ce qui est la regle, puisque l’etat prend une taxe de 75% sur le change) quand mon programme bascule brutalement dans l’imprevu.

De ces deux types a qui je demamdais mon chemin, le premier se declare fort serieusement businessman (il sont un bon paquet dans ce secteur d’activite apprendrais-je par la suite) et le second n’est rien de moins qu’une ancienne gloire du football et ex-talent en lutte (le deuxieme sport nationnal apres le cheval). La confiance commence a s’instaurer quand il cite le nom de Guy Roux, qu’il m’ait dessine le blazon de l’AJA sur le dos d’un bulletin de lotterie et payé le repas. Ils me proposent un tour de la ville, je les suis.

C’est que c’est une drôle d’oasis, Asgabat. Un plan tire au cordeau, partagé par de larges avenues fleuries qui font oublier le gigantisme des batiments qui les bordent. Des palmiers, des portraits geants du President, un Dysneyland local... C’est neuf, clinquant, homogène, mais le tout a autant de chaleur qu’un showroom d’une entreprise de batiment. Une construction résume un peu le tout ; l’edifice a la gloire du peuple turkmene. Il faut s’imaginer une imposante demi –sphere de beton irrisé de lumieres criardes (une alternance de vert et de rose) et puis comme venu du fonds des âges pour rendre hommage au turkmenbasi ; une vingtaine de heros nationnaux exhumes pour l’occasion ont pris l’apprence de statut de bronse de 4 metres... C’est sûr a cote, la replique de la mosquee bleue fait figure de chef d’oeuvre minimaliste.

Certains détails vous font comprendre que le pays n’est pas encore une destination pour le tourisme de masse. On visitait gentiment le monument a la memoire des parents defunts du president quand une equipe de la television d’etat (pleonasme, ici toutes les chaines appartiennent a Niazov), nous tombe dessus. Rapide echanges de «Salam, siz nahili ? » et on me fait comprendre que le moment est venu de m’exprimer sur le pays, face camera ! Il n’y eu pas d’appel au soulevement, et mon speech devrait passer haut le main le censure d’etat. Le tout est progamme vendredi prochain du Channel Dort. La consecration, enfin.

Je ne sais plus comment cela s’est passe mais me voici en train de saluer la famille de Murad (le francophile venerant Zidane, Honore de Balzac et Mitterand) On rigole, on se tape sur la cuisse, et quelques minutes apres je suis presente à la maitresse de Maral, 5 ans, sa fille ainee. La tournee triomphale ne s’arrete neanmoins pas la ; le lutteur pro semble decide a me presenter a ses amis (et a la vitesse ou naissent les amities chez ces gens debonnaires, la nuit promet d’etre courte). C’est au cours de cette soiree-la que je rencontre Horaz. Je suis Francais ? Parfait, il a justement cette bonne amie a lui qui a etudie a Grenoble. Elle vit a Mary, 250 km de la. On partira au petit matin.